Equipe

Dre. Manéli Farahmand (Unifr/ CIC)

Dans ma recherche postdoctorale, le corps est envisagé comme un lieu privilégié de la formation du social (Mottier et Cohen 2016). Il est considéré comme un média ou un espace identitaire qui produit des formes de sociabilités, des valeurs, la déconstruction ou la création de nouvelles normes. En me penchant sur le répertoire des pratiques et discours, les manières de cultiver le corps, la relation à l’espace et les matérialités religieuses, mon étude tente – dans la veine de l’esthétique des religions, de réhabiliter la corporéité des acteurices et du/de la chercheur/se au coeur des travaux scientifiques sur les phénomènes religieux/ spirituels. Dans la lignée des approches fondées par Birgit Meyer (2009), la religion/ spiritualité est considérée comme un lieu de méditation orienté autour de formes sensationnelles. Ces formes sensationnelles produisent des esthétiques particulières et des modes d’engagements qui s’enracinent dans l’expérience sensorielles. Elles organisent l’accès à « l’expérience religieuse », façonnant à la fois les contenus symboliques et les normes.

A travers des entretiens axés sur les récits de vie, les trajectoires thérapeutico-religieuses, et la méthode de l’observation participante propre à la discipline anthropologique, je cherche à comprendre les interactions récentes entre nouvelles spiritualités, milieux holistiques et pratiques du mouvement dansé. Mon terrain ethnographique se déroule dans l’espace des danses néo-spirituelles – dites danses libres et conscientes – en Suisse. Ma recherche porte plus particulièrement sur les dynamiques de genre, les matérialités religieuses et leurs significations, l’organisation sociale des sessions de danses, les registres discursifs, la porté socio-politique, et les postures vis-à-vis des normes sociales. 

Ces milieux appellent à un retour au corps, aux sens et à leur conscience. Certaines tendances combinent mouvement dansé et références spirituelles et/ou de développement personnel/ santé alternative.

Mon hypothèse est la suivante :

De manière parallèle à la sécularisation, on observe aujourd’hui en Suisse une forte montée d’un vaste milieu holistique avec une significative tendance contre-culturelle, dédié à la redécouverte du corps et d’expériences sensorielles à travers le mouvement dansé. Ces expériences sont porteuses de significations sociales. Outre les questions méthodologiques et les dimensions épistémologiques soulevées par la présence active, voire sensorielle ou  corporéisée, de l’anthropologue sur un terrain néo-spirituel, les questions qui animent ma recherche sont les suivantes:

  • Comment et pourquoi des personnes rejoignent aujourd’hui le milieu des danses néo-spirituelles ?

    De quelles manières les modèles de corporéités promus véhiculent-ils des référents spirituels ?

  • Comment sont médiés les discours, les normes et les référents autour du corps ?

  • De quelle manière se performent les subjectivités autour du genre ?

  • Est-on face à des nouvelles micro-politiques du corps ?

  • Quelles sont les relations des acteuristes des danses néo-spirituelles avec les institués (danses, religions historiques, etc.)

Références citées

Cohen, Anouk, Mottier Damien. 2016. “Pour une anthropologie des matérialités religieuses”, Archives de sciences sociales des religions, 174, pp. 349-268.

Foley, Douglas, Valenzuela Angela. 2005. “Critical Ethnography: The Politics of Collaboration. In : Denzin K. Norman, Lincoln S. Yvonna, eds. Handbook of Qualitative Research. Pp. 217-234. Thousand Oaks CA: Sage Publications.

Meyer, Birgit. 2009. “Introduction: From Imagined Communities to Aesthetic Formations:
Religious Mediations, Sensational Forms, and Styles of Binding”, in Aesthetic Formations.
Media, Religion and the Senses, edited by Birgit Meyer, 1–28. New York: Palgrave.

maneli.farahmand@unifr.c

Maxime Papaux

J’étudie les relations entre son, musique et religiosité dans la spiritualité dite New Age et Post New Age. Ma recherche porte sur la « musique holistique »: terme générique que j’utilise pour étudier aussi bien la New Age Music comme genre musical que les pratiques rituelles mobilisant le son à des fins spirituelles et thérapeutiques au sein de la nébuleuse mystique-ésotérique (ex: studios et centres de bien-être).

Une attention particulière est portée aux pratiques et croyances relatives à l’influence du son, des vibrations et des fréquences sur le corps et l’esprit humain. 

Mon analyse repose sur le croisement d’observations participantes et d’entretiens qualitatifs avec un corpus de sources écrites et sonores (tant matérielles que digitales). Entre discours et pratiques, il s’agira de saisir la musique holistique tant à travers sa pensée et son histoire qu’à travers l’expérience vécue et ressentie de ses acteur-trice-s. Le phénomène pourra alors être situé à un niveau plus général dans le contexte de la nouvelle religiosité expressive et individualisée où le corps et les sens sont les véhicules par excellence de l’expérience personnelle jugée garante d’authenticité

Cette recherche a été initié par l’apparente résurgence des musiques ambiantes et new age depuis le milieu des années 2010 – notamment à travers les plateformes de streaming ainsi que l’émergence de label spécialisés dans la distribution et réédition d’artistes anciens et récents labellisés « New age ». L’impact de la pandémie de Covid-19 sur nos modes d’écoute (fermeture des clubs, confinement et anxiété) donna quant à elle lieu à une notable effervescence des musiques méditatives.

Les questions de recherche guidant mon travail sont les suivantes:

  • Quelle est l’origine et l’évolution de la New Age Music?
  • Quels sont les pouvoirs attribués au son sur les corps, l’esprit et l’âme dans le milieu des spiritualités et médecines alternatives?
  • Quelle est l’expérience vécue, ressentie et recherchée à travers l’écoute de musiques holistiques? 
  • En quoi consistent les pratiques rituelles mobilisant le son dans le milieu holistique local?
  • Comment la musique est-elle produite, diffusée, reçue et consommée?

maxime.papaux@unifr.ch

Prof. Dr. Oliver Krüger

Mon étude PowerPoint Religion analyse la transition médiatique dans les services religieux chrétiens marquée notamment par: le passage des recueils de chants physiquement imprimés à la projection de leur contenu sur écran. Au cours des dix dernières années, le PowerPoint est devenu le moyen de communication privilégié des cultes de diverses communautés en Suisse. Le PowerPoint est utilisé non seulement pour guider le chant (style karaoké), mais aussi pour accueillir les visiteurs, donner des instructions et fournir des informations visuelles pendant la prière.

Cette transition médiatique libère les mains des fidèles et leur confère une plus grande possibilité d’expression physique: ils peuvent lever les bras, applaudir, toucher leurs pairs, danser – tout en gardant conjointement leur attention sur le choeur/la scène. Alors que la Réforme du XVIe siècle cherchait à discipliner les croyants en les faisant s’asseoir sur des bancs, cette technologie du Beamer est aujourd’hui utilisée pour attiser la ferveur pendant le culte et encourager l’interaction corporelle. Nous pouvons même supposer que des changements dans les relations entre les genres peuvent être observés dans une « communauté en mouvement ».

oliver.krueger@unifr.ch